“La photographie ment, la sculpture a raison”, quand David Hockney cite Rodin. 

L'horizon me lie au monde et à autrui en un bleu qui se mire...

« J’écris comme on marche – à l’aveuglette, même en plein jour / Comme on va devant soi,

sans songer même à marcher » André Du Bouchet, Carnets. 

Marcher, marcher pour s’imprégner du paysage. Et l'horizon à perte de vue. Ligne subliminale, au calme intangible, parfois limite enveloppante, parfois abîme vertigineux. 
"Tout horizon est fabuleux", écrit Michel Collot car derrière l'horizon le monde continue... 

Je photographie en marchant. La photographie opère une réduction du monde en même temps qu’elle l’amplifie, elle déplace le sujet vers un ailleurs. La marche, quant à elle, invite au découpage, le rythme créant des intervalles entre les images. Ces écarts, espaces blancs, entre, sont un temps suspendu, une fraction du déplacement. Les images prises à différents endroits, sont ensuite assemblées / associées / raccordées entre elles et recomposent un paysage. Je fabule ainsi, un paysage. Peut-être est-ce une façon de “s'offrir une échappée, se permettre un peu de vibrato”. (cf François Jullien). 

Du triptyque au polyptyque... Etirer, étendre, le paysage, révéler sa graphie et faire apparaître des lignes discontinuent. Proposer un polyptyque c’est offrir le reflet d’un déplacement, un geste comme un déploiement linéaire de sa composition. C’est “augmenter le temps et proposer plusieurs points de vues”* DH.
L’utilisation du Polaroid accentue l’impermanence du sujet en conférant aux images une existence et une présence évanescentes. Tout en interrogeant la dialectique apparition/disparition de l’image, les imperfections du procédé renforce cette idée et révèle une oeuvre graphique proche du dessin.